Yvan
Salomone
Yvan
Salomone s’attache à réaliser des vues de zones portuaires. Organisées en
longs panoramas jusqu’en 1991, ses images sont depuis lors régies par un
strict protocole de réalisation. Il prend des photographies dans les ports de
Saint-Malo ou d’ailleurs pour constituer un échantillon de tirages 9x13 cm
qu’il nomme lui-même le petit exemplaire. A partir de celui-ci, «reconstitué,
réparé ou abîmé», il produit de grandes aquarelles au format identique
(105x145 cm).
Ces images d’une apparente banalité fonctionnent de manière
tout à fait paradoxale ; la technique au charme quelque peu désuet semble décalée
par rapport à la force de ces paysages portuaires, le réalisme de la représentation
n’informe d’aucune manière sur les lieux figurés, vides de toute présence
humaine et rendus à l’anonymat. « Le port décrit de case en case
n’existe pas. Ce qui a lieu à partir de cet inventaire régulier est une zone
portuaire mentale progressive », ces mots d’Yvan Salomone rappellent à
quel point l’artiste accorde peu d’importance à la géographie ou à
l’exotisme des sites. Ces vues maritimes ne déclenchent ni la fascination
romantique pour l’inconnu ni l’intérêt pour les jeux de reflets fugitifs
de la lumière sur l’eau chers aux impressionnistes.
Loin de toute visée documentaire, cette collection toujours en expansion n’est pas étrangère à la notion de non-site explorée par Robert Smithson dans les années soixante : « Je transforme le nom des bateaux que je passe par le traitement de l’aquarelle. Par cette simple opération, tous les cargos se modifient, excèdent leur modèle économique, policier, politique et idéologique. Ceci est une façon d’altérer/restaurer les non-sites que sont les navires et la nature des chargements transportés ».