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PIERRE TAL-COAT (1905-1985)
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Paysage, 1973
Mine
de plomb, 55 x 42 cm.
Profil sous l’eau, 1946-1947
Huile, rehauts de gouache sur papier préparé, 50,2 x 50,2 cm
Collection
Pierette Demonlon
Oeuvres reproduites in In
TAL-COAT,
de Jean Leymarie, Skira éditeur, 1992
L’oeuvre de Tal-Coat est une méditation
sur la terre, l’infini du regard, la tentation du silence « mouvance du
monde par le travers de la lumière » (1).
Profondément marqué par les paysages
de Bretagne et la rudesse affectueuse de son enfance, il marche à travers la
campagne en quête d’un état premier, du surgissement d’une rencontre dans
les lents dépôts de la mémoire et des sables. Peinture de l’absolu « trois
points sur une feuille » (1)
en émergence, pour être au monde.
Terre et ciel, rocher, silex,
autoportraits comme une quête d’identité, vols d’oiseaux, troupeaux,
paysages labourés, incisés Surgissant,
Terres immergées , la peinture de Tal-Coat n’est ni un geste, ni un
signe ; c’est la respiration même d’un monde en train de se faire. « Et
ce peintre est un seigneur de la terre, lui qui arpente, l’argile et la poussière
aux pieds mais attentifs à cette lueur au loin, métallique et pure comme un
chant d’alouette, à ce reflet de flaque d’eau, dans le sillon qui hésite
entre la terre-verte et le violet de Mars »
(2).
Autodidacte, Tal-Coat expose pour la
première fois en 1927, des personnages aux yeux fixes, des natures mortes où
on peut voir une influence de Chardin ou de Soutine. Il est remarqué par le
critique et le marchand de tableaux René Gimpel qui déclare « quand je
quitte Tal-Coat, j’ai l’impression que je sors de chez un nouveau Cézanne »
(3).
Il se lie vers 1935 au groupe des Réalités
Nouvelles qui propose « un retour au dessin, au métier consciencieux de
la tradition, dans un contact fervent avec la nature ». Il les quitte
l’année suivante réfractaire à tout mouvement et à toute simplification de
ce qui est cependant fondamental chez lui et qu’il conservera toujours : la
pratique du dessin, la préparation des couleurs et des toiles, l’approche du
réel. Il est passionné par la peinture romane, par les grands aplats, les
formes stylisées aux larges cernes des fresques de Saint-Savin ou de Tavant
comme par les portraits du Fayoum ou l’Apocalypse de Saint-Sever.
Le Portrait
de Gertrude Stein, le Peignoir jaune
révèlent le hiératisme, la tension du regard, l’expressionnisme coloré
qu’il admire chez Van Dongen. A la même époque, il est très lié à Francis
Gruber et Giacometti, et ses personnages comme sur la toile la Femme au renard se griffent de larges traits de couleur : assise,
raide, tendue, comme bouleversée par une vision intérieure, les yeux fixes,
cernés du large trait des peintures funéraires du Fayoum. Sa figuration
devient plus géométrique sous l’influence de Matisse et de Picasso dans la série
des Massacres de la guerre d’Espagne
en 1937.
Pendant plusieurs séjours à Aix en
Provence dans les années de guerre, il médite la leçon de Cézanne avant de découvrir
les lavis chinois de la période des Song. Elément
de nature devient cet espace flottant, tourbillon et cascade, qui
marque l’étape décisive de l’émergence de cette palpitation d’un monde
mouvant, comme suspendu, « de la mouvance du regard, du déroulement du
temps, il est l’effacement qui concerne toute chose qui nous fait apparaître
toute chose » (4).
Sa peinture sera désormais non figurative tout en partant des paysages traversés,
des éléments matériels.
Le
Vert dans l’abrupt fait partie d’un cycle de peintures aux couleurs
intenses, saturées, avec une dominante jaune, verte, rouge ou mauve, d’où
surgissent de la profondeur, des figures, cercles ou carrés qui deviennent ici
yeux et visage, « l’abrupt de vertige comme secoué vibrant à soutenir
offrant sa face » (5).
Une peinture qui joue de la transparence, des empâtements, de « l’apparaître »
et du « disparaître », lieu de la non détermination de la forme,
d’une structure éphémère et secrète. La peinture sera pour Tal-Coat
jusqu’à sa mort en 1985abandon et épuration du réel et de ses mystères,
traces de formes proches de l’invisible prêtes à se fondre à nouveau dans
l’élément brut d’où elles surgissent.
F.D.
(1)
lettre à Françoise Simecek - 19 août 1971, in Tal-Coat : peintures. - Paris : Edition Maeght, 1993
(2)
Tal-Coat : peintures récentes /
Charles Estienne. - Paris : Edition Maeght, 1962
(3)
Tal-Coat / Jean Leymarie. - Genève :
Skira, 1992, p. 20
(4)
lettre à Françoise Simecek - 2 octobre 1978, in Tal-Coat : peintures. - Paris : Edition Maeght, 1993
(2)
Tal-Coat : peintures récentes /
Charles Estienne. - Paris : Edition Maeght, 1972, p. 16
in
Panoramas,
1986-1991, la collection du Frac Bretagne
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