RICHARD LONG  

 A line made by walking, 1967
Photographie NB, 37,5 x 32 cm.
Somerset, England.

 

    L’œuvre est la photo du résultat de l’action. L’action est conçue dès le départ en fonction du cadrage photographique.

 

Stones in Nepal, 1975
Photo couleur


   Dès 1964, Richard Long intervient dans le paysage anglais avant d’arpenter le monde. Il agit selon deux modes distincts. L’un consiste à prendre la photographie d’ une œuvre éphémère effectuée dans et avec la nature ; l'oeuvre pérenne est alors la photo, trace d'une installation qui n'existe plus. L’ autre à prélever des matériaux naturels qui seront ensuite organisés en cercle, spirale, anneau, ligne, carré dans l’espace d’exposition.

L’affiche, la carte, le livre complètent le dispositif de diffusion d’un travail à l’origine solitaire.


 

   Depuis bientôt vingt ans Richard Long arpente la planète et travaille dans et avec le paysage. Formé à la Saint Martin School, dont sont issus Hamish Fulton, Barry Flanagan et Gilbert & Georges, il réalise en 1967 la prémonitoire A Line Made by Walking. Toute l’oeuvre future de Richard Long est contenue dans cette ligne : « faire de l’art en marchant et pouvoir en témoigner par le biais de la photographie ». 1

Il parcourt inlassablement le monde, ponctuant les sites naturels qu’il découvre d’interventions diverses : cercles de pierres ou de bois mort ; lignes de bois flotté ; plus rarement spirales ou labyrinthes ; traînées de boues exécutées à mains nues ; traces laissées au sol par le passage répétitif de ses pas. Il peut, après l’avoir photographiée, détruire la pièce ou laisser à la nature le soin de la redessiner. Richard Long refuse tout recours à une technologie sophistiquée et s’il peut, dans ses premières oeuvres, utiliser des produits manufacturés, très vite, le matériau brut, simplement ramassé, devient la base de son travail. La réalisation, le processus qui conduit à celle-ci, l’accrochage des photographies, les cartes annotées, les textes sont l’oeuvre. Ces différents aspects du travail sont complémentaires. Il n’oppose pas espace extérieur et intérieur, réalise de nombreuses pièces muséales en utilisant des matériaux trouvés à proximité.

   Les deux sculptures acquises par le Frac Bretagne sont deux cercles de pierres, l’un en schiste rouge de la carrière Yvoir à St-Just, réalisé en 1986 pour le Domaine de Kerguéhennec,  l’autre en ardoises et exposé ponctuellement en intérieur. Ainsi un cercle visible de manière permanente parle à nos sens tandis que l’autre, dont nous connaissons surtout la photographie, s’adresse à notre imaginaire. Ces deux pièces résument parfaitement une préoccupation de Richard Long : travailler dans le paysage et ramener des fragments du réel dans l’espace culturel. Il commente ainsi cette complémentarité : «Une pierre, une idée, un ailleurs, c’est souvent la même chose». 2  Le cercle est pour lui la forme élémentaire essentielle, n’appartenant en propre à aucune culture. Chaque oeuvre est très simple mais l’ensemble des cercles dans leurs diversités formelles tend à devenir autre chose, une histoire universelle, une incursion dans le temps, l’espace et c’est bien là le sujet des marches de Richard Long.

P.C.

1 - Entretien avec Henri-François Debailleux, in Libération, 17 avril 1993

2 -op.cit.

in Panoramas, 1986-1991, la collection du Frac Bretagne