Le
poussin, 1955 Relevé de traces
anonymes sur les murs.
Parallèlement à ses Paris de nuit et ses portraits de personnalités, Brassaï constitue à partir de 1930 un ensemble de photographies de graffiti qu’il expose pour la première fois au Museum of Modern Art de New-York en 1957. Proche du Surréalisme et lié à Picasso dont il photographie les sculptures en 1932, il développe une analyse sensible et interprétative de ces motifs dessinés et gravés. L’artiste repère les graffiti dont il fait des croquis accompagnés d’annotations sur leurs origines et leur sujet. Ensuite, il les photographie en plan rapproché avec un éclairage approprié et les classe par catégories thématiques.
Dès 1933, il
en publie quelques-uns dans le Minotaure avec un article « Du mur des
cavernes au mur d’usines ». Selon lui, cette forme d’expression
urbaine a des règles formelles et des fonctions similaires aux peintures
primitives. C’est un art brut avec des thèmes et des symboles récurrents. La
catégorie des Animaux à laquelle
appartient Le Poussin, taillé dans la
pierre par dessus deux coeurs gravés, fait référence au culte de la bête.
Les oiseaux et les poissons qui font partie d’un vocabulaire symbolique ancien
sont plus représentés. Survivance du culte crânien, l’image de la mort
hante les rues de Paris et est devenue un signe de danger et de fatalité. La
photographie de 1948, prise 66 rue des Rigoles, montre une tête de mort formée
maladroitement par trois cavités et traversée par l’incision de deux tibias
entrecroisés. Les diverses figures inscrites dans la pierre évoquent des
simulacres de mise à mort ou encore d’êtres fabuleux et insolites qui
composent la mythologie enfantine. Elles sont regroupées sous la thématique de
la magie. Ainsi la Tête de clown (1946)
, inquiétante, avec des initiales à sa base, est aussi celle d’un magicien
que l’on craint ou auquel on s’identifie. Pour Brassaï, le graffiti,
« langage des murs », a la fonction magique d’exorciser les peurs,
les fantasmes etc. et rejoint le rôle originel de l’art. M.L.C. Panoramas, 1986-1991, la collection du Frac Bretagne
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